2018 : il est temps de repenser le devenir de nos déchets !

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Parmi les dossiers importants de cette législature, l’élaboration d’un plan de prévention et d’un plan de gestion des déchets fait partie des priorités du Ministre Carlo Di Antonio. Le nouveau Plan wallon Déchets-Ressources (PwD-R) doit succéder au plan (obsolète) Horizon 2010. Les attentes sont fortes car le PwD-R pourrait poser les jalons d’une voie qui mènerait la Wallonie vers le « Zéro déchet ».

La réduction drastique de nos déchets, la fin du modèle consistant à « prélever-fabriquer-jeter » et le développement d’une économie plus circulaire sont des enjeux environnementaux et économiques cruciaux. Pourtant, la Wallonie n’est toujours pas dotée d’une stratégie en phase avec ces défis.

Annoncé pour fin 2017, le PwD-R devrait être adopté avant fin 2018. Ce plan a déjà été soumis à enquête publique et aux avis des instances consultatives l’année dernière mais son adoption en 2018 peut s’avérer délicate vu le contexte d’élections communales.

Car les communes sont des acteurs de première ligne en matière de prévention et de gestion des déchets. Or si le projet de PwD-R insiste sur le respect de l’autonomie communale et conforte la maîtrise publique de la gestion des déchets ménagers (principalement par des intercommunales), il affiche (timidement) l’ambition de sortir de la logique sous-régionaliste notamment en limitant les capacités des outils de traitement et en encourageant les synergies entre intercommunales. Cette volonté est à saluer.

Pour IEW, elle devrait idéalement s’inscrire dans une stratégie « Wallonie zéro déchet 2050 » dotée d’une planification à long terme des outils de traitement avec entre autres :

  • l’abandon de la mise en CET,
  • un phasing-out du recours à l’incinération,
  • l’optimisation des outils de gestion des déchets à l’échelle régionale.

Autant de mesures qui impacteront le business model des intercommunales et les rentrées financières de leurs actionnaires…

Il reste à espérer que les objectifs de bonne gouvernance affichés ces derniers temps se concrétisent aussi à travers la politique de gestion des déchets.

Avec les nouvelles orientations du Paquet Economie Circulaire au niveau européen, la Wallonie ne peut se contenter de rester un bon élève en matière de tri et de recyclage. Prévention et réutilisation devront constituer les priorités du PwD-R !

Certaines mesures du projet de plan mettent la Wallonie sur la bonne voie et devront être concrétisées :

  • objectifs chiffrés de réduction du gaspillage alimentaire,
  • objectifs de réutilisation distincts des taux de recyclage avec premier objectif chiffré d’objets collectés en vue de la réutilisation…

La Région devra aussi oser jouer sur le signal prix pour faire évoluer les comportements en activant certains leviers pour limiter la production de déchets (taxation des différents modes de gestion selon leur place sur l’échelle de Lansink, tarification au poids, interdiction d’usage de certains produits à usage unique, sanctions financières pour contrevenants…).

Le projet de PwD-R pèche par l’absence d’objectifs chiffrés pour les déchets industriels, alors que ceux-ci constituent plus de 80 % du gisement de déchets en Wallonie. On ne peut se contenter de la promotion de pratiques vertueuses, il faut fixer un cap et travailler avec les entreprises pour lever les freins à une meilleure valorisation de leurs flux.

Si le Ministre Jeholet en charge de l’Economie annonce une série d’initiatives à destination des entreprises en la matière, on ne peut qu’encourager l’articulation de celles-ci avec le PwD-R. Car le danger est de rester dans une vision compartimentée des différents maillons de l’économie circulaire alors qu’elle ne pourra donner des résultats que si l’ensemble de la chaîne de valeur est pris en compte.

L’économie circulaire nécessite une approche systémique orientée « ressources » avec un décloisonnement entre les secteurs produisant les déchets et ceux qui les gèrent.

Quant au budget annoncé par le Ministre Di Antonio pour la politique générale Déchets-Ressources en 2018, soit 19 millions d’euros (une augmentation de 4.6% par rapport à 2017), il est très difficile d’en déduire une adéquation avec les ambitions affichées dans le projet de PWD-R, sans priorisation et ciblage des mesures, et une analyse fine de leurs coûts/bénéfices, ce qui faisait défaut au stade des consultations.

Si le temps imparti pour boucler cette législature ne permet pas de co-construire et d’élaborer avec la société civile une vision à plus long terme de la politique des Déchets-Ressources, l’adoption d’un PwD-R ambitieux peut être une réelle opportunité pour la Wallonie.

Il peut constituer un premier jalon d’une véritable stratégie qui vise le «zéro déchet-2050 » en incluant non seulement les acteurs « historiques » du secteur des déchets mais aussi de nouveaux acteurs économiques qui réinventent nos modes de production et de consommation ainsi que d’autres acteurs de la société civile.

Gaëlle Warnant

Économie Circulaire