Le DAR irrite la Commission européenne

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La Belgique mise en demeure de s’expliquer sur le « Décret des autorisations régionales» adopté par la Région wallonne pour accélérer la réalisation de certaines infrastructures (liaison CHB, extension des aéroports…)

Le 26 janvier 2009, la Fédération Inter-Environnement Wallonie introduisait devant la Cour constitutionnelle un recours en annulation à l’encontre des dispositions générales du décret « DAR »[[Décret des autorisations régionales. L’intitulé exact du décret est « Décret relatif à quelques permis pour lesquels il existe des motifs impérieux d’intérêt général »]] . Ce recours était loin d’être isolé : plus d’une dizaine furent introduits parallèlement à celui de la Fédération.
Aujourd’hui, les remous autour de ce texte controversé ont franchi les frontières du territoire wallon. Le DAR a en effet piqué au vif la Commission européenne qui, ce 25 juin, vient d’adresser à la Belgique une mis en demeure … motivée par les même arguments que ceux développés par la Fédération.

Pour rappel, la procédure mise en place par le DAR consiste à considérer certains permis comme relevant de « motifs impérieux d’intérêt général » et à les soumettre pour ratification au Parlement. Ces permis échappent dès lors à toute possibilité de recours devant le Conseil d’Etat, l’acte final d’autorisation par le Parlement étant un acte législatif pour lequel seule la Cour constitutionnelle a la compétence de sanction. Sont notamment concernés la liaison CHB, l’extension des aéroports de Bierset et Gosselies, les travaux du RER, etc.

La Fédération Inter-Environnement Wallonie dénonce dans ce décret une atteinte à la séparation des pouvoirs mais, surtout, un recul potentiel en terme de protection de l’environnement. En effet, les compétences de la Cour constitutionnelle ne lui permettent pas de vérifier la légalité des procédures d’instruction conduisant à l’octroi du permis (par exemple, le respect des procédures d’évaluations des incidences sur l’environnement).

La mise en demeure adressée aujourd’hui par les instances européennes rejoint les craintes exprimées par la Fédération.

La mise en demeure stipule en effet que :

 « En absence de précisions sur les modalités de délivrance de ces permis, la Commission considère que le décret ne garantit pas que lesdits permis feront l’objet d’une étude d’incidence et que la participation du public sera assurée (…) »

 « De surcroît, les permis ratifiés dans le cadre de cette procédure dérogatoire ne pourront faire l’objet d’un recours juridictionnel que devant la Cour constitutionnelle de Belgique. Un tel recours exige de la part des requérants qu’ils démontrent un intérêt personnel et direct. Dès lors, il apparaît que ce recours juridictionnel est restrictif notamment pour les organisations non-gouvernementales. De plus, le Conseil constitutionnel ne peut exercer son contrôle qu’au regard de normes constitutionnelles et ainsi la Cour constitutionnelle ne pourra se prononcer sur la légalité de la procédure d’évaluation proprement dite. Par suite, la Commission est d’avis que le décret n’est pas conforme aux dispositions de l’article 10bis de la directive. »

En conséquence :

« La Commission invite votre gouvernement, conformément à l’article à l’article 226 du traité instituant la Commission européenne, à lui faire parvenir ses observations sur ce qui précède dans un délai de deux mois à compter de la réception de la présente lettre de mise en demeure. »

Visiblement, donc, la procédure que ce texte entendait mettre en place afin, selon les auteurs du projet, de « donner au Parlement wallon un rôle actif »[[Doc. Parl. Wal., sess. 2007 – 2008, n°805/1, p. 59]] soulève de nombreuses objections et apparaît nettement moins légitime que les parlementaires qui ont adopté le décret voulaient le croire…

A noter que dans le cadre des consultations préalables à la mise en place d’un nouvel exécutif régional, la Fédération n’a évidemment pas manqué de solliciter la suppression de ce décret, arguant notamment du fait que l’intérêt public peut être – et est déjà – pris en compte par les autres outils législatifs.

La suite au prochain épisode…

Canopea