Episode 1 : le cycle de l’eau dans les dérèglements climatiques

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Précipitations plus intenses et moins régulières, inondations et sécheresse, fonte des glaciers ou élévation du niveau des mers… l’eau est le vecteur par lequel le dérèglement climatique va se traduire le plus fort et le plus fréquemment. Quels seront les impacts du dérèglement climatique sur le cycle de l’eau en Wallonie et comment notre région se prépare-t-elle aux manques et aux excès d’eau ?

FACTS :

  • Avec un réchauffement à 2.3°C, des inondations comme nous en avons connu en juillet 2021 pourront être 5x plus fréquentes.
  • Entre 1992 et 2020, le volume d’eau stocké dans les lacs a diminué de 53% à travers le monde.
  • Sur les 34 masses d’eau souterraine de Wallonie, une est en mauvais état du point de vue de la quantité d’eau, mais 3 autres sont désormais classées comme “à risque”.

1.2°C, c’est le niveau de réchauffement actuel de notre climat par rapport à l’ère pré industrielle. Les Accords de Paris visent à limiter le réchauffement à 1.5°C… La marge qu’il nous reste est faible. Pourtant elle est cruciale, car du taux de réchauffement va également dépendre l’ampleur des modifications du cycle de l’eau.

Evolution de la T° moyenne annuelle à Bruxelles entre 1833 et 2019 (Source : IRM).

Impacts sur l’eau disponible

Premièrement, une hausse des températures va impliquer une hausse de l’évaporation (évaporation directe des surfaces d’eau) et de l’évapotranspiration (vapeur d’eau émise par la végétation dans son processus de respiration). On retrouvera ainsi moins d’eau sous forme liquide, mais plus sous forme de vapeur dans l’atmosphère. Entre 1992 et 2020, le volume d’eau stocké dans les plus grands lacs du monde a déjà diminué de 53%, à la fois à cause du dérèglement climatique et de la surexploitation de la ressource.

Or, la vapeur d’eau est le principal gaz à effet de serre : sans vapeur d’eau dans notre atmosphère, la T° à la surface de la terre serait de -18°C. La vapeur d’eau est ainsi un gaz à effet de serre “naturel” sans lequel la vie ne serait pas possible sur notre planète. Mais au cours des dernières décennies, c’est l’accumulation dans l’atmosphère d’autres gaz, tels que le CO2, qui fait augmenter la T° à la surface de la terre, et donc les phénomènes d’évaporation, et donc la quantité de vapeur d’eau dans l’atmosphère et donc la T° à la surface de la Terre…  

Augmentation de la concentration de l’atmosphère en vapeur d’eau entre 1980 et 2010 au Colorado, Etats-Unis (Source : Hurst et al. 2011)

Impacts sur les précipitations

Du point de vue des précipitations, sous nos latitudes, ce n’est pas tellement la quantité de pluie tombée qui va changer, mais la régularité avec laquelle elle le fait.

Historiquement, il pleut grosso modo en Wallonie, la même quantité d’eau chaque mois, entre 50 et 80 mm. Sous forme différentes (des gros orages en été, de la neige ou de la bruine en hiver), mais chaque mois de l’année voit une quantité similaire d’eau tombée. Cette répartition saisonnière assez peu contrastée nous permet jusqu’ici d’avoir des besoins en eau d’irrigation très faibles (<1% de l’eau captée sur le territoire).

Régularité saisonnière des précipitations mesurée à Uccle entre 1961 et 2020 (Source: IRM)

Avec le dérèglement climatique, on s’attend à des pluies plus rares, mais plus intenses, favorisant ainsi la fréquence des épisodes de sécheresses et d’inondations.

Ainsi, avec un réchauffement à 2.3°C, un phénomène d’inondation comme nous en avons connu en juillet 2021, aura chaque année 5x plus de chance de se produire (on passe d’une période de retour de 100 ans à une période de retour de 20 ans).

Impacts sur l’infiltration et l’eau souterraine

L’augmentation de l’évaporation et la modification de la régularité des précipitations vont également générer une baisse d’infiltration de l’eau vers les nappes souterraines. En effet, sur un sol très sec (après une sécheresse) ou très saturé (pendant une pluie très intense), l’eau va préférer ruisseler plutôt que de s’infiltrer vers le sous-sol. En parallèle, l’exploitation des ressources souterraines sera grandissante, pour irriguer en période de sécheresse par exemple. Chaque année, les aquifères perdent ainsi de l’eau qu’ils ne récupèreront pas par les précipitations.

C’est le cas en Europe, où les niveaux d’eau souterraine sont en baisse sur l’ensemble du territoire, mais également en Wallonie. En effet, même si actuellement 1 seule masse d’eau est considérée en mauvais état du point de vue de la quantité d’eau stockée, 3 autres masses d’eau souterraines montrent des tendances à la baisse et sont maintenant considérées comme “à risque”1.

Pistes de solution

Le dérèglement climatique se joue à l’échelle mondiale et nos gestes du quotidien ne suffiront pas à inverser la tendance. Notre première mission est donc de demander à nos responsables politiques à mettre en place de manière urgente les actions connues et scientifiquement démontrées qui nous permettront de respecter les engagements pris dans l’Accord de Paris.

En attendant la révolution verte, beaucoup peut être fait à l’échelle wallonne pour limiter les impacts du dérèglement du cycle de l’eau sur notre territoire. En interdisant la construction en zone inondable, en préservant les zones humides, en régénérant les forêts, en réconciliant agriculture et nature. Canopea, Natagora et WWF ont ainsi émis 10 propositions de solutions basées sur la nature à mettre en place rapidement sur le territoire pour rendre celui-ci plus résilient faces aux manques – et aux excès – d’eau.

Et après ?

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Crédit photo d’illustration : Adobe Stock

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  1. PGDH 3, SPW, 2023