Etat des lieux sur la santé des forêts wallonnes

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L’OWSF, l’Observatoire wallon de la santé des forêts, du DEMNA (Département de l’étude du milieu naturel et agricole), a pour mission de centraliser les données et les connaissances relatives à la santé des forêts sur les territoires wallon et bruxellois. Il publie chaque année « La Lettre de l’OWSF » qui récapitule de manière scientifique et très complète l’état des lieux sur l’année écoulée.

Les missions de l’OWSF sont :

  • la production d’un bilan périodique de la santé des peuplements forestiers wallons et bruxellois
  • la détection et l’identification des insectes et champignons pathogènes responsables des maladies en forêts wallonne et bruxelloise
  • la participation à l’élaboration de cartes de risques biotiques et abiotiques, sur base de l’état de vulnérabilité des essences forestières, des stations et des risques sanitaires en forêt
  • la centralisation des connaissances suffisantes pour mettre en œuvre une lutte coordonnée en situation de crise sanitaire

La lettre de l’OWSF 2024 met en évidence de nombreux constats.

Inquiétude générale sur l’avenir de nos forêts

Année particulièrement humide à la suite d’une succession presque ininterrompue de sécheresses depuis 2015, l’année 2024 a permis aux stocks d’eau de se remplir et d’atténuer les impacts de la sécheresse en cours. Léger répit pour notre belle forêt, car les constats sont alarmants.

Environ 65% de la forêt wallonne est composée de 4 essences que sont l’épicéa – qui, a lui seul, représente ¼ de la forêt wallonne – le chêne, le hêtre et le douglas. Ces 4 essences sont sujettes à de nombreuses maladies ou attaques d’insectes et champignons, surtout lorsqu’elles sont déjà affaiblies par les événements climatiques extrêmes et surtout les sécheresses.

Ces dernières années, l’épicéa, surtout en peuplement monospécifique de basse altitude, a subi les dégâts des scolytes (Ips typographus) de façon spectaculaire, un petit insecte qui trace ses galeries sous l’écorce et qui mène à la mort des individus en quelques semaines. Si cette crise semble se calmer depuis 2024, il suffirait d’un nouveau printemps très sec et chaud sur une durée assez longue qui créerait un nouveau stress hydrique aux arbres pour la relancer, ce qui risque d’arriver rapidement.

Le chêne est particulièrement en danger en Fagne-Famenne-Calestienne et en Lorraine où il subit des dépérissements qui facilitent le développement des agriles (Agrilus biguttatus), petit insecte qui apprécie lui aussi les périodes chaudes et sèches. Ailleurs, le chêne est également la cible de la chenille processionnaire (Thaumetopoea processionea) et de l’oïdium (Microsphaera alphitoides), un champignon reconnaissable sur les feuilles qui sont recouvertes d’une poudre blanche, elles finissent par se recroqueviller, dessécher et tomber. L’OWSF proposait déjà en 2016 une approche particulière pour « La gestion de nos chênes à la croisée des chemins ».

Concernant le hêtre, il est depuis quelques années sujet à du dépérissement. Une étude1 a mis en évidence une dégradation progressive des houppiers traduisant une baisse de vitalité, mais peu de mortalité. Les modèles climatiques indiquent que son aire de répartition sera fortement déplacée vers le Nord d’ici la fin du siècle.

Et le douglas, essence qui pour beaucoup allait remplacer l’épicéa, est principalement attaqué par un champignon appelé Rouille suisse (Phaeocryptopus gaeumannii) qui mène à la perte des aiguilles. La Cécidomyie (Contarinia pseudotsugae) fait également des dégâts, mais semble ralentir ces dernières années.

Sans oublier le Frêne qui disparait petit à petit du paysage à cause de la Chalarose (Hymenoscyphus fraxineus) et surtout l’Orme qui a déjà presque complètement disparu dû à la Graphiose (Ophiostoma novo-ulmi).

Actuellement, il n’y a plus que les mélèzes et les charmes qui sont encore considérés comme étant en bonne santé par l’OWSF. Bien que toutes les essences précédentes développent des risques, ceux-ci ne sont pas présents partout et tout le temps. Certains peuplements se portent très bien, mais surtout lorsqu’ils sont sur une station adéquate, ce qui signifie que les essences d’arbre sont situées sur de bonnes conditions pédo-climatiques.

Quels sont, dès lors, les meilleurs conseils à donner aux propriétaires et gestionnaires forestiers ? Les premiers réflexes sont évidemment de placer la bonne essence au bon endroit en fonction des sols et des conditions climatiques et de prendre soin des sols pour l’avenir.

Mais ce qui est réellement une urgence actuellement, c’est de diversifier les peuplements, en essences et en structure (arbres d’âges différents). Nous ne pouvons plus nous permettre de mettre tous nos œufs dans le même panier, c’est une évidence écologique, mais également économique.

Le mardi 15 avril 2025 avaient lieu les Rencontres Filière Bois, événement annuel réunissant tous les acteurs de la forêt, allant des pépiniéristes aux menuisiers, en passant par les gestionnaires et les entreprises de travaux forestiers. Le thème de cette année était « La filière bois à la croisée des forêts : La forêt évolue, la filière s’adapte ». L’occasion de mettre en évidence que la forêt wallonne se diversifie, oui, mais… beaucoup trop lentement selon les experts présents.

Crédit image illustration : Adobe Stock

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  1. Pirronitto, S. , Teng, F. & Chandelier, A. (2023). Le dépérissement du hêtre en Ardenne : résultat d’une étude menée de 2019 à 2022 Forêt.Nature 164, pp. 35-42. ↩︎