La sécurité des usagers vulnérables passe par des villes et communes wallonnes à 30 km/h

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Une Carte Blanche parue sur le site du journal La Libre le mercredi 07/05/2025 et cosignée par Jean Mansuy de Canopea, Luc Goffinet du Gracq et Anna Tinebra de Tous à pied.

Plusieurs enquêtes menées par le SPF Mobilité et Transport, dont les récents Chiffres-clés du vélo en Belgique, démontrent que l’insécurité liée au comportement des autres usagers de la route constitue l’un des freins principaux à l’usage de la marche et du vélo en Belgique, juste derrière les conditions météorologiques
1. Or, il semble plus aisé de modifier les comportements de mobilité que la météo.

La première mesure pour améliorer la sécurité des usagers vulnérables consiste à réduire le différentiel de vitesse entre les modes en réduisant la vitesse maximale autorisée (VMA). Cette méthode constitue en particulier un élément central d’une politique de sécurité routière en agglomération, du fait de la présence importante d’usagers vulnérables. 

Une récente synthèse des études scientifiques étudiant les impacts d’une réduction de la VMA de 50km/h à 30km/h2 a notamment démontré qu’une telle mesure réduit en moyenne le nombre d’accidents d’un tiers, et le nombre de décès de près de moitié. Qui plus est, cette mesure possède également de nombreux cobénéfices en matière de santé publique.

On pourrait craindre qu’une telle réduction de la VMA augmente le temps de trajet. Or, la synthèse citée plus haut démontre qu’en moyenne le temps de trajet n’est pas impacté par une réduction de vitesse de 50 à 30km/h. En effet, la vitesse moyenne réellement pratiquée en ville, lorsque la vitesse est limitée à 50km/h, est d’environ 19km/h du fait de la densité de la circulation et des nombreux arrêts aux croisements. Dans le même temps, une réduction de vitesse à 30km/h permet de fluidifier le trafic en réduisant les cycles d’accélération et de décélération. 

Cette mesure permet également de limiter le besoin en infrastructures dans les quartiers où le trafic est limité, et de concentrer les moyens sur les grands axes, où le trafic important nécessite toujours des aménagements séparés pour les usagers vulnérables. La mise en place d’infrastructures sécurisées séparées, approche privilégiée dans la Déclaration de Politique Régionale wallonne, nécessitant des investissements importants, une réduction de la vitesse constitue donc un prérequis pour réduire l’insécurité routière de manière efficace et à moindre coût.

Face à ces nombreux avantages, une dizaine de grandes villes européennes (dont Bruxelles) ont déjà sauté le pas et réduit la vitesse maximale autorisée par défaut à 30km/h. À une échelle plus large, l’Espagne, l’Allemagne, la France, l’Autriche et le Pays de Galles ont également adopté des mesures similaires sur l’ensemble de leurs agglomérations, tandis que l’Irlande est en train de la mettre en place. Ces expériences montrent déjà des résultats très positifs. Par exemple, au Pays de Galle, la compagnie d’assurance Esure a enregistré une baisse de 20% des réclamations liées aux accidents de la route depuis la mise en place de la mesure.

Définir la vitesse maximale autorisée en agglomération à 30 km/h par défaut, tout en conservant éventuellement des exceptions à 50 km/h pour certains itinéraires de transit (généralement définis dans les plans communaux de mobilité) répond également à l’aspiration des citoyens wallons. En effet, plus de la moitié des Wallons (56%) estiment important de « réduire la vitesse à 30km/h dans les agglomérations pour améliorer la sécurité »3. La Wallonie franchira-t-elle donc bientôt le pas ? 

Réduire les vitesses de circulation en agglomération constituait la première recommandation des Etats Généraux de la Sécurité Routière de 2020. En 2023, une mesure visant à « déployer des zones apaisées dans les agglomérations et en particulier les zones 30 […] en étroite concertation avec les communes » a été introduite dans le Plan Air Climat Energie (PACE). Ces recommandations et déclarations d’intention doivent maintenant être traduites en actes. Et le moment est venu d’agir : le Gouvernement wallon doit définir son Code wallon de la voie publique, volet régional du Code national qui entrera en vigueur au premier septembre 2026. Pour la sécurité des usagers vulnérables, pour un partage apaisé de l’espace public entre tous ses usagers, et pour la santé de tous les Wallons, nous demandons au Gouvernement d’intégrer le 30km/h en agglomération par défaut au Code wallon de la voie publique. 

Crédit photo : Adobe Stock

  1. Service public fédéral Mobilité et Transports. (2020). Avantages et inconvénients des modes de transport usuels. Service public fédéral Mobilité et Transports. (2025). Chiffres-clés du vélo en Belgique.
  2. Yannis, G., Michelaraki, E. (2025). Effectiveness of 30 km/h speed limit – A literature review. Journal of Safety Research. 92, pp. 490-503
  3. Walk, Tous à Pied, Voetgangersbeweging. (2023). Baromètre piéton