Perception du bruit en Wallonie

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Contexte

CANOPEA a réalisé une enquête citoyenne sur la perception de l’environnement sonore en Wallonie. Ce sondage (en ligne) s’est déroulé d’octobre 2021 à janvier 2022. Au total, 1289 citoyen·ne·s ont répondu à l’enquête. Merci pour leur participation !

  • Le·la lecteur·rice intéressé·e trouvera le rapport d’enquête complet via ce lien. Pour celles et ceux n’ayant pas forcément le temps et l’envie de parcourir 63 pages détaillées, nous vous proposons ici une petite synthèse des informations d’intérêt.
  • Pour plus d’informations sur les liens entre pollution sonore et santé, nous vous suggérons la lecture de cet article :Le bruit, ce son devenu nuisible pour la santé
    Pour un bref état des lieux sur les pistes d’actions envisageables et enviables à l’échelle de la Wallonie, nous vous suggérons la lecture de cet article : Investissons dans l’environnement sonore

Problématique du bruit

Les effets néfastes qu’ont les nuisances sonores sur la santé humaine ne sont plus à démontrer. Selon l’Agence européenne pour l’environnement (EEA), 20% de la population européenne sont exposés à des niveaux de bruits néfastes pour la santé1. Les transports (trafic routier, ferroviaire et aérien) constituent la source principale de pollution sonore.

Mais à partir de quand, un « son » peut-il être considéré comme un « bruit » ? La perception plus ou moins dérangeante d’un son étant subjective, cette question est légitime ! Pour se mettre au diapason sur la définition du « bruit », tournons-nous vers la Commission Européenne. Dans sa Directive relative au bruit environnemental2, le « bruit dans l’environnement » est un « son extérieur non désiré ou nuisible résultant d’activités humaines, y compris le bruit émis par les moyens de transports, le trafic routier, ferroviaire ou aérien et provenant de sites d’activité industrielle ». Pour compléter cette définition, un bruit peut-être qualifié de « nuisible » lorsqu’il présente des « effets néfastes pour la santé humaine ».

Les enquêtes citoyennes sont précieuses en vue de mieux appréhender sous quelles formes se manifeste cette gêne chez les wallon·ne·s !

Profil des personnes sondées

Pour répondre à ce sondage, les citoyen·ne·s devaient avoir plus de 18 ans et résider en Wallonie. Les figures suivantes donnent un bref aperçu du public échantillonné (âge, genre, lieu de vie, …).

Comme le montre les cartes suivantes, la Province la mieux représentée est celle de Liège, représentant 31% de l’échantillonnage. Les Provinces de Namur, du Hainaut et du Brabant Wallon sont représentées de manière assez équitable (~20 % de l’échantillon pour chacune). La Province du Luxembourg est quant à elle représentée par seulement 7 % des personnes sondées.

Quelques questions ont été posées afin de connaître la situation familiale de la population échantillonnée ainsi que son degré de scolarité.

Durant le sondage, les participant·e·s ont estimé leur moyen de déplacement principal en termes de distance parcourue (nombre de kilomètres) ainsi qu’en termes de fréquence (nombre de déplacements). Comme en témoigne le graphique suivant, l’échantillonnage est majoritairement composé d’individus dont le mode de déplacement principal est la voiture.

Généralités sur la perception du bruit

Le Word Cloud ci-dessous synthétise, par ordre d’importance (taille des mots), les réponses obtenues à la question « Pour vous, le bruit c'est ... ? ».

Figure 1: Word Cloud - Définition personnelle du bruit

Pour 25% des répondants, le bruit est une « agression insupportable au quotidien », pour 20% le bruit est « une gêne qui augmente sans cesse ». Ce type de question permet aussi de mettre en avant que ce ne sont pas que des personnes « intolérantes au bruit » qui prirent le temps de répondre à ce sondage. En effet, une personne interrogée sur cinq « ne prête pas attention au bruit » dans leur quotidien.

Quant à la vigilance accordée à la qualité de leur environnement sonore, la grande majorité (92 %) des répondant·e·s déclare faire attention aux nuisances sonores qu’ils pourraient engendrer dans leur quotidien.

Pour les répondant·e·s se déplaçant principalement en voiture ou en moto (soit 77 % de l’échantillonnage), seuls 5 % d’entre eux estiment que leur véhicule (voiture, moto) émet plus de bruit que la moyenne.

Nous avons également tenté d’évaluer la satisfaction générale de l’environnement sonore quotidien. La « satisfaction » et la « gêne » ont ainsi été sondées.

Figure 2: Synthèse de réponses obtenues aux questions relatives à la perception générale de l'environnement sonore

Concernant la perception de l’enjeux sanitaire, la majorité – environ 93% - des personnes sondées sont conscientes que l’exposition au bruit peut avoir des impacts sur la santé.

L’histogramme suivant reprend les réponses obtenues à la question : « Avez-vous l'un des problèmes de santé suivants ? Pensez-vous qu'il est lié au bruit de votre environnement ? ».

Quelles sont les sources de bruit gênantes ?

La frange de l’échantillonnage ayant déclaré être « gênée » par le bruit au quotidien – soit 69,3% (893) des répondant·e·s (voir illustration précédente) - a été invitée à préciser la (ou les) source(s) de bruit les plus dérangeante(s) à leurs yeux. L’illustration suivante reprend uniquement les principales sources de bruit identifiées comme étant les plus gênantes (1er choix parmi cinq choix possibles sur 15 propositions).

Figure 3: Sources de bruit identifiées prioritairement  comme "gênantes" par les répondant·e·s (1er choix sur cinq)

Lorsque le trafic routier (« mixte », « voiture », « moto », « camion ») était sélectionné en premier ou deuxième choix comme source principale de nuisances sonores, un complément d’information a été demandé afin de préciser le type de gêne.

Figure 4:Type de nuisances sonores liées au trafic routier lorsque cette source de bruit a été retenue en 1er ou 2ème choix (parmi cinq)

Logement vs. Perception du bruit

Une partie du questionnaire était dédiée à l’impact du bruit à domicile.

L’échantillon de la population sondée occupent les types de logement suivants :  ;

46%Maison 4 façades
23%Maison mitoyenne 3 façades
18%Maison mitoyenne 2 façades
7%Appartement dans résidence / immeuble
5%Appartement dans ancienne maison divisée
 1%Autres

La figure suivante synthétise la perception de la gêne liée au bruit à domicile. La majorité (62 %) des personnes interrogées est impactée par le bruit à domicile.

Figure 5:Perception générale de la gêne liée l'environnement sonore (tous logements confondus, la proportion du type logement occupé par les personnes sondées est également reprise au centre du graphique en anneau)

Pour différencier la tendance des perceptions selon le type de logement, la figure ci-dessousrésume les réponses obtenues pour les principaux types de logement.

Figure 6:Perception de la gêne liée l'environnement sonore selon le type de logement

Les répondant·e·s ont ensuite été invité·e·s à estimer la qualité de l’isolation phonique de leur logement.

Figure 7:Perception générale de la qualité de l'isolation (tous logements confondus)

Deux questions subsidiaires ont été posées aux 62 % de répondant·e·s ayant déclaré être incommodés par le bruit à domicile (soit 794 personnes).

Figure 8:Comportements face au bruit à domicile : proportion des occurrences de réponses obtenues (échantillonnage restreint : 794 répondant·e·s)
Figure 9:Identification des sources de bruit incommodantes à domicile

La suite du questionnaire permit également de mieux cerner l’éventuelle distinction entre l’exposition au bruit à l’intérieur et/ou à l’extérieur de l’habitation ainsi que d’identifier le moment où la gêne se fait le plus ressentir.


Figure 10 : Période où la gêne au bruit survient à domicile (Jour / Nuit) toutes sources de bruit confondues

Figure 11:Provenance de la gêne au bruit à domicile (Intérieur / Extérieur) toutes sources de bruit confondues

Quant à la perception de l’évolution de l’environnement sonore ressenti à domicile, la majorité (65 %) des répondant·e·s estime que le bruit s’est intensifié depuis qu’ils ont emménagé.

Figure 14: : Evolution de la perception de l'environnement sonore à domicile

Focus sur les nuisances sonores liées au trafic routier

La moitié (52 %) des personnes sondées habite à proximité d’un axe routier considéré comme bruyant et dérangeant.

Pour cette franche de l’échantillonnage, il s’agit essentiellement d’axe routier dont la densité de trafic est jugée intense (57 %) et modérée (40 %).

Figure 15: Estimation de la densité de population trafic sur les axes routiers perçus comme bruyants

Concernant la vitesse de circulation moyenne sur les tronçons au bruit dérangeant, il s’agit principalement (43 %) d’axes routiers où la vitesse est limitée à 50 km/h (quelle que soit la densité de trafic). En deuxième position (23 %) arrive les autoroutes limitées à 120 km/h (surtout là où la densité de trafic est intense).

Figure 16:Limites de vitesse sur les axes routiers bruyants

Sans les citer, il a ensuite été demandé à l’ensemble des répondant·e·s s’ils avaient connaissance de dispositifs / mesures dédiés à limiter le bruit du trafic à proximité de leur habitation. Le degré de satisfaction de ces actions a également été sondé.

Le bruit au travail

Etant donné que le domicile n’est pas forcément le lieu le plus fréquenté en semaine, la suite du questionnaire s’est également intéressée aux éventuelles nuisances sonores ressenties sur le lieu de travail.

Mesures à prendre et recommandations citoyennes

Afin de mieux identifier les nuisances sonores principales sur lesquelles agir, il a été demandé à l’ensemble des participant·e·s de sélectionner la source de bruit qu’ils souhaiteraient voir prioritairement jugulée en Wallonie.

Figure 17:Sources de bruit identifiées comme prioritaires dans les plans d'action à mettre en œuvre (Proportions des réponses obtenues à la question à choix unique)

En fin de questionnaire, les répondant·e·s ont pu sélectionner les propositions de mesures / actions qu’ils souhaiteraient voir à l’œuvre pour lutter contre le bruit.

Parmi les « autres » propositions avancées (champs libres complétés par 20 % des répondant·e·s) figurent notamment :

Trafic routier :

  • Renforcer le réseau de murs anti-bruit existant le long des autoroutes, en particulier à proximité des agglomérations (revoir les valeurs seuils d’exposition sonore à la baisse afin que plus de tronçons autoroutiers puissent être équipés de ces dispositifs) ;
  • Sanctionner les comportements bruyants (conduite sportive, klaxons intempestifs, …) ;
  • Equiper/former la police pour contrôler les émissions sonores des véhicules bruyants et faciliter la sanction des conducteurs ayant un véhicule contenant des pièces non-homologuées (pot d’échappement bruyant, …) ;
  • Equiper davantage les voiries d’équipements destinés à ralentir le trafic ;
  • Limiter l’accès aux camions (excepté livraisons) et véhicules agricoles en centre urbain ;
  • Stimuler et accompagner la mobilité douce, faciliter l’accès aux cyclistes dans les centres-villes ;
  • Faire respecter les zones « Excepté circulation locale » ;
  • Limiter la vitesse en agglomérations ;
  • Assurer un meilleur contrôle des limites de vitesses de circulation réglementaires ;
  • Imposer contrôle technique pour les motos
  • Informer en temps réel les usagers de la route du bruit émis par leur véhicule ;
  • Installer des radars sonores (déploiement en cours dans plusieurs villes françaises)
  • Diminuer la puissance sonore des sirènes de police et d’ambulance ;
  • Aménager / préserver espaces verts « brise bruit », …

Équipements :

  • Définir un cadre réglementaire pour l’installation des pompes à chaleur ;
  • Réglementer émissions sonores des systèmes des équipements (outils de jardinage, ventilations extérieures, …) ;
  • Limiter les plages horaires l’utilisation des engins de jardinage (tondeuses, souffleurs, tailles haie),

Loisirs :

  • Interdire les sports moteurs et activités bruyantes le dimanche (moto cross, quad, aéronefs de loisirs, club de tir, …) ;
  • Contrôler le respect des « zones de quiétudes », sanctionner les sports moteurs fréquentant ces zones ;
  • Renforcer les règlements communaux pour les nuisances sonores issues du voisinage ;
  • Fermer les discothèques installées dans les zones résidentielles, … ;

Trafic aérien :

  • Assurer un meilleur contrôle des zones de décollage et des couloirs d’aviation
  • Limiter/Interdire l’ensemble des vols de nuit (tels que d’application dans de nombreux pays européens), en particulier les appareils de la classe « Heavy » et autres gros porteurs le week-end ;
  • Limiter le développement du fret aérien ;
  • Interdire la circulation des anciens modèles d’avions (plus bruyants que la moyenne) ;
  • Interdire le passage à basse altitude au-dessus d’agglomérations ;
  • Etendre les aides à l’isolation à l’ensemble des zones (A, B, C, D)
  • Réviser les normes d’émissions afin de mieux prendre en compte l’impact sur le bien-être et la santé (normes OMS)

Industries / entreprises :

  • Elargir la réglementation relative aux nuisances sonores (Permis d’environnement,…) aux entreprises qui n’y sont pas encore soumises ;
  • Chantiers / travaux :
  • Interdire les chantiers bruyants en période nocturne ;

Généralités :

  • Sensibiliser les jeunes aux impacts du bruit sur la santé ;
  • Renforcer le cadre législatif tel que ce fut le cas en France avec l’article R1336-5 (10 août 2017) du code de la Santé Publique : « Aucun bruit particulier ne doit, par sa durée, sa répétition ou son intensité, porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l'homme, dans un lieu public ou privé, qu'une personne en soit elle-même à l'origine ou que ce soit par l'intermédiaire d'une personne, d'une chose dont elle a la garde ou d'un animal placé sous sa responsabilité. »
  • Imposer aux promoteurs immobiliers d’isoler acoustiquement (normes à définir) les nouvelles constructions ainsi que les rénovations, …

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  1. EEA Report No 22/2019 : Environmental Noise in Europe – 2020
  2. Directive 2002/49/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 juin 2002 relative à l’évaluation et à la gestion du bruit dans l’environnement – Déclaration de la Commission au sein du comité de conciliation concernant la directive relative à l’évaluation et à la gestion du bruit ambiant