Quel secteur industriel est stratégique ? 

Un nouvel outil aide les décideurs à le déterminer

Le Gouvernement wallon a récemment annoncé sa volonté de revoir la stratégie économique de la Région. Notamment, il propose de revoir les secteurs ‘’stratégiques’’ que la Région soutiendra en priorité (via sa  politique de Cluster et de Pôles de compétitivité).

Mais comment décider quel secteur est stratégique pour la Wallonie ?

 Il est crucial de définir une méthodologie la plus neutre possible pour déterminer les secteurs dans lesquels nous devons investir et même ceux dans lesquels, sur le long terme, il n’est pas ou plus stratégique de le faire. C’est particulièrement vrai pour les investissements industriels qui s’inscrivent dans le temps long.

Un outil d’analyse systémique

Bond Beter Leefmilieu, notre fédération soeur en Flandres,  a précisément chargé le centre d’étude Ortelius de réaliser une étude pour répondre à cet impératif en regardant à court terme mais aussi en se projetant dans le futur.

Ortelius structure son outil autour de  3 piliers déclinés ensuite en  23 critères d’évaluation à prendre en compte pour savoir si le secteur industriel contribue effectivement à une politique industrielle solide sur  le long terme.

1. Prospérité économique : dans quel secteur dispose-t-on d’un tissu d’acteurs économiques et sociétaux, d’une connaissance technologique et de travailleurs qualifiés ? Où aller chercher de la valeur ajoutée dans le futur ? Il s’agit en fait d’analyser systématiquement les avantages comparatifs que notre région/pays à par rapport aux régions concurrentes.
2. Sensibilité par rapport aux chocs extérieurs (résilience) : qu’est-ce que cela signifie dans le contexte de crise systémique dans lequelle nous avons basculé : tension géopolitique, tension sur la disponibilité de matières premières, perturbation des chaines d’approvisionnement ? Mais aussi, importance stratégique du secteur pour assurer les piliers d’une société harmonieuse et prospère : l’approvisionnement énergétique et en matériaux, l’autonomie alimentaire ou la sécurité nationale…
3. Durabilité: l’outil propose de regarder l’inscription du secteur dans  ‘’la crise au-dessus des autres ‘’. Car il est acquis qu’une société harmonieuse et prospère ne peut exister dans un environnement largement dégradé, incapable d’assurer ce que les économistes orthodoxes appellent ‘’les services écosystémiques’’.

Revoir les priorités ?

Ortelius a appliqué cet outil à certains secteurs clés en Flandres.

Il ressort de cette analyse que lorsqu’on regarde des secteurs industriels de manière plus systémique en analysant non seulement leur potentiel économique mais aussi leur capacité à absorber les chocs ou à s’inscrire dans les limites planétaires, certains secteurs s’en sortent moins bien que d’autres.

A titre exemplatif, Ortelius évalue si l’électrification de la pétrochimie anversoise qui est au cœur de la stratégie de développement industriel flamande est réellement le choix le plus stratégique (voir tableau1 ci-dessus). L’outil met en lumière non seulement qu’en matière économique, la pétrochimie repose sur des importations massives de produits pétroliers qui renforcent notre dépendance à des pays ‘’peu fiables’’, mais aussi l’incompatibilité du secteur avec le respect des limites planétaires.  A ce titre, d’autres secteurs s’en sortent beaucoup mieux sur les 3 piliers (le rapport regarde par exemple le secteur du recyclage de matière première : tableau 2)

A l’heure où les Gouvernements wallon et fédéral entendent redessiner les stratégies de redéploiement industriel, cet outil présente au minimum l’intérêt de souligner des questions cruciales à se poser pour mettre les rares moyens publics dont nous disposons dans les investissements/mécanismes de soutien de secteurs industriels porteurs d’avenir.

Vous pouvez retrouver l’étude sur le site de BBL (en anglais)

Crédit image illustration : Adobe Stock