StopBeton – Où en est-on ?

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« StopBeton » en Wallonie ? A entendre les acteurs du secteur de la construction ou le monde politique, on a parfois l’impression d’être sur la bonne voie pour stopper l’éparpillement urbain en Wallonie… Il n’en est rien ! La Wallonie bétonne à tour de bras et la situation est très contrastée selon les régions et d’une ville à l’autre. Enfin, de manière préoccupante, les communes qui s’urbanisent le plus vite, sont celles qui sont éloignées des bassins de vie, donc celles où la dépendance à la voiture est déjà la plus importante.

Pas de climat sans StopBeton

Est-ce encore utile de rappeler à quel point l’éparpillement urbain est LE problème environnemental à régler en priorité si nous voulons répondre non seulement au défi climatique mais de manière plus large, à la crise environnementale multiforme que nous traversons. Augmentation des besoins de transport, perte d’espace pour la biodiversité, perte de terres agricoles, appauvrissement des sols… Sur-occuper l’espace a un coût environnemental. En outre, la durée de vie des immeubles étant longue, tous ces impacts environnementaux sont souvent irréversibles à court terme. Par exemple, une maison construite dans les zones les plus rurales de Wallonie impliquera pour ses habitants des besoins de transport importants sur plusieurs générations  (des transports en commun efficaces ne sont pas envisageables dans des régions peu peuplées). Créer de nouvelles dépendances automobiles au moment où nous savons qu’il est impératif de baisser drastiquement nos émissions de GES semble tout simplement incohérent.

Nous devrions donc pratiquement arrêter de « bétonner » un territoire déjà largement occupé par l’Homme (15% du territoire sont déjà artificialisés)… Hélas, au niveau régional, on en est loin… 12 KM2/an de terre continuent d’être artificialisés1 en Wallonie soit tout de même 4,5 terrains de foot par jour ! C’est principalement la construction de logements qui se cache derrière ce chiffre. La bonne nouvelle est que ce taux diminue depuis une dizaine d’années (dans les années 90, on artificialisait encore à 18KM2/an2) mais le chemin reste long pour atteindre l’objectif zéro béton !

Une baisse loin d’être généralisée

Si on regarde la Wallonie à l’échelle sous régionale3, on observe de grandes disparités. Ainsi les grandes régions déjà densément artificialisées comme l’ensemble des arrondissements situés dans la vallée de la Sambre et de la basse Meuse (Mons, Charleroi, Liège…) l’artificialisation s’est très nettement ralentie ces 10 dernières années.  C’est également le cas dans la plupart des communes du sud de Bruxelles comme Waterloo où 42% du territoire sont déjà artificialisés (situation comparable à celle de Liège).

Cette carte extraite de l’Etat de l’environnement wallon montre l’évolution contrastée par commune des taux d’artificialisation

Par contre l’évolution demeure très préoccupante dans les régions historiquement marquées par leur caractère rural (terres agricoles ou forêts), c’est-à-dire au Sud du sillon Sambre et Meuse, tout particulièrement près de la frontière luxembourgeoise et dans l’Est de la province de Liège.

Certaines de ces communes rurales accélèrent encore leur artificialisation à l’heure où il faudrait freiner des 4 fers ! (Herve, Couvin, Léglise…)  Cette accélération varie parfois au sein d’une même sous-région, indice de politiques communales différentes en matière d’aménagement du territoire. Si on regarde Clavier dans le Condroz, l’artificialisation s’accélère (de 2%/an entre 97 et 2007 à 3%/an ces 10 dernière années) alors que ce taux reste plutôt stable dans les communes voisines.

Sauver la campagne…

Evidemment, vu l’espace disponible, il semblerait logique que ces communes s’urbanisent plus vite (proportionnellement au bâti existant). Et contrairement à cette logique, il est crucial de préserver ces zones du modèle d’urbanisation « mangeur d’espace » qui a déjà modifié l’essentiel de notre territoire. Elles représentent autant d’espaces de respiration pour la nature mais également pour l’Homme. Préserver ces espaces relève d’une responsabilité morale.

Pourtant, à leur échelle, ces communes vivent souvent une véritable révolution structurelle. Prenons la commune la moins densément urbanisée de Wallonie, Stoumont, près de Spa. Si les zones urbanisées n’y occupent encore que 2,5% de son territoire (!) elles s’accroissent de presque 3% par an soit un doublement en 30 ans. Si en terme d’espace cette commune demeurera très largement couverte de forêts et de terres agricoles, il est évident que le caractère rural de son bâti aura été bouleversé par une telle évolution.

Et maintenant, implémenter le SDT

Le Nouveau Schéma de développement du territoire en cours d’approbation fixe comme objectif notamment de créer des logements « sans artificialisation à l’horizon 2050 » et d’avoir « 50% en reconstruction de terrains artificialisés » à l’horizon 2030… Cet objectif démontre en tous cas une prise de conscience du problème qui est salutaire. Il faut maintenant traduire cette prise de conscience en résultats concrets sur le territoire wallon,… mais aussi dans le cœur des Wallons, qui bat toujours à coté de la brique qu’il aurait dans le ventre… Créer une société résiliente face au climat passera forcément par cette (r)évolution…

Voir également : StopBeton et budget, ça bug

* par rapport à 1997

  1. Cette notion d’artificialisation est large, elle comprend les surface “bétonnées”mais aussi les jardins …
  2. https://www.iweps.be/indicateur-statistique/artificialisation-du-sol/
  3. Le soir a notamment publié récemment une infographie qui reprend l’évolution constatée ces dernières années en matière d’artificialisation : https://plus.lesoir.be/205864/article/2019-02-10/immobilier-votre-commune-se-betonne-t-elle-carte-interactive